L’article 1938 du Code civil régit le cautionnement omnibus comme un contrat de garantie par lequel le garant s’engage à garantir l’exécution de toutes les obligations, présentes et futures, que le débiteur a assumées ou assumera à l’égard du créancier en vertu du contrat d’ouverture de crédit.
Les sections unies de la Cour suprême de cassation, dans l’arrêt n° 41994 de 2021, sont intervenues sur la question de la nullité des cautionnements omnibus établis conformément au régime ABI au motif qu’ils sont contraires au droit de la concurrence.
La question découle d’une demande présentée par un garant devant la Cour d’appel de Rome en vue d’obtenir la nullité (même partielle) du cautionnement pour violation de la loi sur les ententes et les abus de position dominante. Cette demande était motivée par la conformité de certaines clauses contractuelles – en particulier les articles 2, 6 et 8 du contrat – avec le régime établi par l’Association bancaire italienne.
Accédant partiellement aux demandes du « garant », la Cour a déclaré les articles 2, 6 et 8 du contrat de cautionnement nuls et non avenus et a condamné la Banque au paiement de dommages-intérêts.
Plus précisément, les clauses contractuelles visées sont les suivantes :
Art. 2 Clause de révocation « le garant remboursera à la banque toutes les sommes perçues par elle en paiement d’obligations garanties et qui doivent être restituées par suite de l’annulation, de l’inefficacité ou de la révocation de ces paiements, ou pour toute autre raison ».
Art. 6 Clause d’exception à l’art. 1957 du Code civil « les droits de la banque résultant du cautionnement demeurent intacts jusqu’à l’extinction de toutes ses créances sur le débiteur, sans qu’elle soit obligée de poursuivre le débiteur ou la caution eux-mêmes ou tout autre coobligé ou garant dans les délais prévus, selon le cas, par l’art. 1957 du Code civil, qui est réputé avoir été renoncé »
Art. 8 Clause de continuation du cautionnement, en cas d’extinction et de nullité de l’obligation principale « si les obligations garanties sont déclarées nulles, la caution garantit néanmoins l’obligation du débiteur de rembourser les sommes qui lui ont été versées ».
La Banque s’est pourvue en cassation contre cet arrêt, en se fondant sur :
- sur le caractère unilatéral des déclarations de garantie, imputable à la volonté du garant ;
- sur l’argument selon lequel la nullité de l’entente anticoncurrentielle ne s’étend pas aux contrats individuels ;
- sur la requalification du contrat de garantie autonome auquel l’article 1957 du code civil ne s’applique pas ;
- sur l’absence de fondement de la demande de dommages-intérêts.
La Cour de cassation, considérant la question comme particulièrement pertinente d’un point de vue juridique, a donc renvoyé le litige devant les sections unies.
Il convient de noter qu’au fil des ans, une série de décisions contradictoires ont été rendues sur la question de la validité ou non des garanties bancaires contenant de telles clauses, ce qui a donné lieu à trois orientations jurisprudentielles clairement définies :
- Une première orientation a considéré ces clauses comme valables, n’accordant au garant qu’une protection compensatoire.
- Une deuxième orientation considérait ces clauses comme nulles et non avenues parce qu’elles étaient contraires à l’article 2, paragraphe II, point a), de la loi n° 287/90.
- Enfin, une troisième orientation (prévalant sur les deux autres), était en faveur d’une nullité partielle des clauses en vertu de l’article 1419 paragraphe I du Code civil, avec pour conséquence l’élimination des seules clauses reproduisant l’accord de concurrence.
La question posée aux Sections Unies, qui trouve son origine dans la décision n° 55 du 02.05.2005 par laquelle la Banque d’Italie – appelée à se prononcer sur la conformité entre le schéma préparé par l’ABI et la réglementation sur les accords restrictifs de la concurrence – a vu la confirmation de la thèse selon laquelle les « contrats de cautionnement en aval sont partiellement nuls en vertu de l’art. 2 alinéa 3, de la loi n° 287/1990 et de l’article 1419 du Code civil italien, pour les seules clauses qui reproduisent celles du régime unilatéral constituant l’accord interdit, à moins qu’une intention différente des parties ne puisse être déduite du contrat ou ne soit autrement prouvée ».
Le contrat de cautionnement reste valable, mais il est « libéré » des clauses déclarées nulles et non avenues par la Banque d’Italie.
Et quelles sont les conséquences de la nullité partielle du contrat de cautionnement ?
- L’action en nullité n’est pas soumise à l’imprescriptibilité.
- Recevabilité de l’action en répétition de l’indu.
- Recevabilité de l’action en dommages et intérêts.
Cependant, la conséquence la plus importante concernera la situation des garants débiteurs signataires de contrats de cautionnement contenant les clauses 2, 6 et 8 incriminées puisque, dans l’hypothèse où ils seraient sommés par un établissement de crédit de payer les sommes dues, ils pourront faire valoir la nullité partielle du cautionnement et, en particulier, de l’article 6 contenant l’exception à l’article 1957 du code civil.